Faire progresser l’apprentissage des médecins spécialistes pour offrir les meilleurs soins de santé à la population.

Tracer la voie : les possibilités et les défis d’une doyenne fondatrice

Urgentologue, chef de file en formation médicale, doyenne associée et maintenant, doyenne fondatrice,  Teresa Chan, MD, FRCPC, DRCPSC est bien connue de toute la communauté de la formation médicale. Son apport est immense, mais ce dont elle est le plus fière, c’est d’avoir créé des plateformes pour aider les autres à apprendre, à se développer et à s’épanouir.

En juillet 2023, la Dre Chan a été nommée doyenne fondatrice et vice-présidente, Affaires médicales, de la Faculté de médecine de l’Université métropolitaine de Toronto (TMU). Elle arrive de l’Université McMaster, où elle a été doyenne associée au Bureau du développement professionnel continu, et professeure agrégée, Division de médecine d’urgence, au Département de médecine de la Faculté des sciences de la santé. Urgentologue au sein réseau Hamilton Health Sciences depuis 2013, elle a également été clinicienne-chercheuse pour le programme MERIT (McMaster Education, Research, Innovation and Theory).  

Huit mois après son entrée en fonction, la Dre Chan nous fait part de ses réflexions sur les enjeux prioritaires en formation médicale et ses propres priorités, à titre de doyenne fondatrice de la TMU. Elle donne aussi quelques conseils fondés sur des données probantes aux femmes médecins qui aspirent à un poste de direction.

Dr. Teresa Chan headshot

Dre Teresa Chan, FRCPC, DRCPSC (photo soumise)

1. En 2021, vous avez reçu le Prix du leadership du Collège royal pour les médecins en début de carrière (volet développement professionnel continu). En quoi la formation médicale a-t-elle changé depuis? Quels sont les enjeux les plus importants? 

En 2021, en pleine pandémie, nous étions souvent aux premières lignes de la lutte contre la COVID-19, nous allions prêter main-forte aux cliniques de vaccination et nous travaillions à la maison, tout en tentant de rester en contact avec nos êtres chers en dépit des mesures de confinement et de distanciation. Les failles dans nos systèmes de santé – signalées même avant la COVID – sont encore plus évidentes aujourd’hui, et les taux de fatigue et d’épuisement professionnel chez les médecins n’ont jamais été aussi élevés.

Lorsque j’envisage l’enseignement médical dans ce contexte, deux priorités se dégagent : l’innovation des systèmes et le soutien personnel. Même s’il va de soi, sur le plan clinique, d’aider nos collègues et le corps étudiant individuellement, nous devons réfléchir aux solutions systémiques que le milieu universitaire peut favoriser. La technologie doit être mise à profit pour alléger le fardeau des médecins. Nous devons adapter nos systèmes pour mieux appuyer les médecins qui mettront bientôt fin à leur pratique de façon à ne pas désavantager les patient·es. Nous devons aussi innover pour contribuer à l’épanouissement des stagiaires et des médecins.

2. Votre apport à la formation médicale est immense. De quoi êtes-vous le plus fière et pourquoi?  

Je suis reconnaissante à ceux et celles qui m’ont précédée et qui ont excellé en formation médicale, et je suis fière d’avoir redonné à la société en créant des plateformes pour aider d’autres personnes à apprendre, à se développer et à s’épanouir. Je pense notamment au lancement de groupes de recherche tels que METRIQ study, TEaCHHub ou GAMER (Games As Medical Education Research), ou encore à l’aide apportée à la création et à la promotion de groupes de formation en accès libre tels que CanadiEM.org ou ALiEM.com, ainsi que leurs programmes incubateurs, de mentorat et de formation complémentaire.

En tant que doyenne de la nouvelle faculté de médecine de la TMU, je fais partie d’une formidable équipe qui crée actuellement LA plateforme propice aux talents. La possibilité de créer un écosystème dynamique composé du corps enseignant, des apprenant·es et du personnel, avec l’appui d’un établissement qui s’emploie à changer les choses et à vaincre les obstacles, est vraiment extraordinaire.

3. Qu’avez-vous trouvé le plus difficile, compte tenu de tout ce que vous avez apporté et réalisé, et pourquoi? 

La fondation de la 18e faculté de médecine au Canada, en vue de lancer des programmes de formation médicale prédoctorale et postdoctorale en 2025, est un projet très complexe, et certainement le plus difficile à réaliser pour les membres de notre équipe à l’université. Je suis tellement reconnaissante envers nos extraordinaires collègues de partout au pays pour leur contribution à ce projet.

Dr. Teresa Chan in lab coat

La Dre Teresa Chan est la doyenne fondatrice de la 18e faculté de médecine au Canada, à l’Université métropolitaine de Toronto (photo soumise)

4. À titre de doyenne fondatrice de cette faculté de médecine, qu’avez-vous le plus hâte d’entreprendre? Quelles sont vos priorités?

Depuis que j’occupe ce poste (juillet 2023), je n’ai pas tant cherché à me projeter dans l’avenir qu’à me concentrer sur le travail à accomplir. Mes priorités sont les mêmes que celles de la communauté et du reste de notre équipe.

Nos activités reposent sur cinq piliers, établis en consultation avec la communauté :  

  • les soins primaires communautaires et les déterminants sociaux de la santé;
  • la prestation de soins adaptés à la culture à diverses communautés;
  • l’amélioration des soins et de leurs résultats à l’aide d’innovations technologiques; 
  • le soutien de la santé et du bien-être de la population vieillissante;
  • les outils de réseautage interprofessionnel en vue d’améliorer la prestation des soins. 

Nous recrutons également les membres du corps professoral de notre faculté. Ils et elles nous aideront à créer et à mettre en place les nombreuses structures dont nous avons besoin pour assurer la réussite de ce projet. Je suis enchantée de participer aux entrevues, et de constater que tant de médecins sont enthousiastes à l’idée d’apporter leur contribution.

5. Quels défis et occasions uniques sont rattachés à votre nouveau rôle? 

Le travail de doyenne est loin d’être facile, et celui de doyenne fondatrice l’est encore moins, à bien des égards : il y a beaucoup à faire, qu’il s’agisse d’embaucher les membres de l’équipe ou d’établir des politiques et des procédures. Le travail ne manque pas!   
Ce nouveau rôle comporte toutefois d’énormes possibilités, et je le rappelle d’ailleurs souvent au personnel du décanat et aux membres de l’équipe. Nous prenons du recul, lisons la littérature, échangeons avec nos collègues et remettons le statu quo en question. Nous intégrons l’équité au fondement même de la faculté. Par exemple, plutôt que de remanier un programme existant dans une optique d’équité, nous pouvons créer de toutes pièces le matériel dont nous avons besoin – comme des modules d’apprentissage à partir de cas concrets et des diagrammes d’anatomie – de manière à refléter la diversité des communautés que notre faculté servira. 

6. Que conseilleriez-vous aux femmes médecins qui aspirent à occuper un poste de direction ou qui souhaitent avancer dans la formation médicale?

En date de février 2024, pour la toute première fois en Ontario, on compte plus de doyennes que de doyens… et ce ne sera pas la dernière. L’une des équipes de recherche, dirigée par la Dre Melissa Parsons, avec laquelle j’ai collaboré s’est penchée sur la question. Voici quelques conseils fondés sur des données probantes. 

Repoussez les frontières

  • Établissez un réseau social géographiquement diversifié, mais avec un créneau, des passions, une vision ou des valeurs similaires. 

Trouvez une façon de rester en contact  

  • Une fois votre réseau établi, prenez le temps de cultiver la collaboration. Le jeu en vaut la chandelle. 

Trouvez des façons de joindre l’utile à l’agréable 

  • Faites preuve de créativité en intégrant vos passions à vos fonctions professionnelles. Pour ma part, comme j’adore les jeux de société, j’ai inventé un jeu « sérieux » appelé GridlockED en appliquant les connaissances extraites de ma thèse. J’ai depuis effectué d’autres recherches en lien avec le jeu, une façon pour moi d’apprendre en m’amusant. 

Cultivez une dynamique de confiance

  • Déterminez vos objectifs et bâtissez vos relations de collaboration dans un espace sécuritaire. Faites preuve d’honnêteté et d’intégrité. Soyez authentique : les gens souhaiteront collaborer avec vous, car vous leur inspirerez confiance.